Le capitaine entra hâtivement dans une tente de campagne sobrement décorée. Au fond de l’abri de fortune, un homme en armure se tenait de ses deux poings gantelés au dessus d’une carte des enfers, semblant se parler à lui-même. Il redressa la tête vers l’arrivant :
_ « Alors St James, comment sont les nouvelles recrues ? »
Le capitaine sortit de sa bouche son cigare mâchouillé et s’exprima avec un accent Irlandais prononcé :
_ « Alors c’est des bleus. Ah ! Pour sur ils ont de bons yeux : ils peuvent tirer un mulot à cinquante pas. Mais sur le champ de bataille, on a l’impression qu’ils ont pris la culasse de leur arme dans le cul. Ils ont tellement de mal à tirer leurs épées qu’ont dirait qu’ils n’ont jamais décalotté… »
_ « Passons sur les détails. Nous avons besoin de votre avis éclairé. »
Francisco Vargas désigna plusieurs piles de caisses au fond de la tente. Aidan passa sa main dans la première, à laquelle deux planches avaient déjà été retirées, et en sortit un gantelet finement ciselé.
_ « Beau boulot. On pourrait presque faire du tricot avec… »
Son œil fut immédiatement attiré par une autre caisse, de laquelle il sortit rapidement une longue arquebuse. Il fut immédiatement surpris par sa légèreté, mais surtout par la finesse du canon. Puis il sortit une bille d'un autre carton, avec une charge cylindrique. Au fur et à mesure qu’il chargeait l’arme, son visage s’assombrissait. Vargas s’avança vers lui :
_ « Nous attendions plus d’enthousiasme de votre part. Ces armes ne sont elles pas superbes ? »
_ « Pour sur Francisco. Charge rapide, balle fine, dispersion minimale... »
Aidan jeta le gantelet au sol et braqua le canon de l’arme sur la pièce. La détonation fut puissante, mais le bras du vétéran ne bougea pas d’un cil. Aidan ramassa la pièce et la jeta sur la carte : elle était perforée avec précision de part en part. Il tira une grosse bouffée sur son cigare.
_ « …on n’arrête pas le progrès, mais on arrête plus les balles. »
Dessin par PapaOurs