Nouvelle : Luxure

[bréchuedent]

« Toutes mes félicitations ma sœur, vous les avez massacrés avec une cruauté qui a attiré l’attention d’Assaliah hell-même ! »

Sœur Valentine sortait de sa torpeur, le Cornu la regardait amicalement, elle avait vaguement l’impression qu’il lui faisait des compliments, elle n’était nullement effrayée, juste surprise.

Les images défilaient dans sa mémoire. Les longues années passées à soigner les malades à l’hôpital de Bruges, la nouvelle de la « découverte » de Magdebourg, la sœur supérieure qui l’envoie soigner les pauvres de Nouvelle Jérusalem. La descente par la porte des Enfers et la cabane où on accueillait les pauvres et les malades de la ville basse. Puis ce capitaine qui cherchait un médecin pour son poste avancé, la marche dans les marais et l’arrivée à l’avant poste Espagnol, lugubre et austère.

L’avant poste servait de relais pour les expéditions dans les marais. Un jours une troupe revint, il y eut ces palabres entre le capitaine du poste et l’officier commandant l’expédition, l’inquiétude qui se lisait sur les visages et cette statuette manipulée avec mille précautions et que le commandant décida d'enfermer dans la chapelle. Il y avait cet homme blessé que sœur Valentine soigna et qui dans son délire parlait de choses insensées. Puis il y eut l’attaque, les hommes qui tombaient, ces êtres mi-hommes mi-insectes qui d’un coup de hallebarde coupaient un combattant en deux, la mort du capitaine, la tête tranchée par un étrange disque, l’assaut final et les quelques survivants qui se retranchent dans la chapelle.

Ils étaient cinq : une grosse brute qui maniait la hache comme d’autres manient un couteau à mangeaille, un arquebusier, un spadassin, un grenadier qui n’avait plus qu’une main, et sœur Valentine. Ils attendaient que la porte s’ouvre laissant entrer à la fois leur destin et leurs ennemis, mais rien ne se passa. Les Egarés les avaient-ils oubliés ? Les attendaient-ils dehors ? Jouaient-ils au chat et la souris, s’amusant de leurs angoisses ? Les minutes, puis les heures passaient, aucun bruit, aucun mouvement au-dehors.

Ils attendirent trois jours et trois nuits, pour autant qu’on puisse différencier les jours des nuits dans les marais de Göt Whalle ! Puis la faim fut plus forte que la peur, ils sortirent pour trouver l’avant poste désert. Plus d’Egarés, plus de cadavres, mis à part les dégâts de l’assaut, le fortin était relativement intact. Plus que tout, les vivres étaient toujours là !

Ce soir-là les hommes burent beaucoup, jusqu’au moment où la grosse brute donna du coude dans les côtes de l’arquebusier et désigna sœur Valentine du coin de l’œil. Avant qu’elle ait compris les hommes étaient sur elle.

« Bien, dit l’ambassadeur Infernal, et te souviens-tu de ce que tu as fait après avoir séché tes larmes et essuyé tes cuisses ? »

Sœur Valentine se souvenait, elle s’était réveillée en larmes, les hommes s’étaient endormis, elle les avait attachés sans qu’ils opposent de résistance, sauf la grosse qui s’était réveillée, elle lui avait éclaté la tête à coups de crosse de pistolet, jusqu’à ce que sa cervelle se répande sur la table comme du lait caillé.

Sœur Valentine regarda le démon : « J’ai du mal pour la suite »
Le Cornu sourit « Ne me dis pas que tu as oublié le meilleur ! Je vais t’aider. Les marais de Gôt-Whalle ont retenti des cris des trois hommes pendant près d’une journée. Tu les as fait souffrir longtemps, passant de l’un à l’autre, attendant qu’ils reprennent connaissance avant de les faire souffrir à nouveau. Finalement tu as introduit les testicules de l’arquebusier dans le canon de son arme avant de tirer, quelle imagination ! Tu as découpé la peau du spadassin en lanière, il est mort fouetté avec sa propre rapière ! Quant au dernier, tu lui arraché les tripes d’une seule main, coudée après coudée,… en passant par son fondement ! Et puis, quand le dernier eut rendu l’âme, tu t’es assise et tu t’es remise à pleurer, puis lasse, tu as pris une corde, et tu as mis fin à ton existence terrestre »

« Et je suis ici parce que je me suis suicidé ? » demanda Sœur Valentine.
« Pas exactement, te rappelles-tu de la raison de ton suicide ? »

Sœur Valentine frémit, elle ne s’était pas pendue à cause de la honte de son viol ou par remord pour le massacre de ses agresseurs. Elle se souvenait de la sensation au creux de son ventre quand elle voyait la peur, la douleur et le désespoir dans leurs yeux, quand ils la suppliaient de ne plus les faire souffrir ! Elle se souvenait de la jouissance qu’elle avait ressentie, du sentiment de bonheur et de puissance qui l’avait envahi. L’idée même de ne plus ressentir ce plaisir pervers lui était devenue insupportable. Elle s’était pendue parce qu’elle avait connu des sensations qui lui seraient à jamais interdites !

Valentine, méditait sur son destin, une vie entière consacrée à la charité et au dévouement, une place assurée au paradis, perdue en quelques heures. Mais tout cela ne la chagrinait pas !

« Et que vais-je devenir demanda Sœur Valentine ? »

L’Ambassadeur sourit à nouveau,
« Mais, vous allez faire ce que vous faites le mieux sœur Succube, tuer des hommes ! »

Un sourire carnassier éclaira le visage de Valentine , finalement, l’idée qu’elle se faisait du paradis devait être très surfaite, et elle se réjouit de passer une éternité d’Enfer !

[nald]

toute mes félicitations, non vraiment j'aime beaucoup, l'ambiance et le thème sont bien sombre a souhait, j'attends avec impatience les autres........rassure moi il y aura des autres?

sinon quand je vois comment tu écris j'ai envie de me brûler le bras droit pour arrêter d'écrire!!!!!!

see you in hell

[Ekks-O]

Chouette comme tout, encore une fois.

Une autre vision du truc, qui dévoile la fin avant le début, sans gâcher l'affaire.

Bien, bien.

Mais doit-on en déduire que les Succubes sont les Grandes damnées de la Luxure ?

[bréchuedent]

merci pour tout c'est trop !

"Mais doit-on en déduire que les Succubes sont les Grandes damnées de la Luxure ?"
Pas forcément, la vie de luxure de Valentine ne fait que commencer !

Ce qui me plait bien dans cette nouvelle c'est le contraste entre la vie chaste de soeur Valentine et sa présence en Enfer.
On peut comprendre qu'elle a perdu son paradis en un jour, ou au contraire comprendre qu'une éternité de luxure est sa récompense....et de là à dire qu'enfer et paradis ne font qu'un,... est un pas que je ne franchirai pas ! 

[icedheart]

Salut

J'ai bien apprécié la lecture de cette nouvelle, cependant, contrairement a ton texte précédent ou le péché était bien identifié (gourmandise), le sadisme qui a perdu la soeur est, a mon avis, lié a la vengeance et a la colere et ne se rapporte pas vraiment a la luxure.

[Fenris]

Salut

J'ai bien apprécié la lecture de cette nouvelle, cependant, contrairement a ton texte précédent ou le péché était bien identifié (gourmandise), le sadisme qui a perdu la soeur est, a mon avis, lié a la vengeance et a la colere et ne se rapporte pas vraiment a la luxure.

relis bien le paragraphe à la fin qui explique la raison de son suicide... 

[icedheart]

J'ai bien lu (et relu) mais reste néanmoins sur ma position. Le plaisir n'a pas été obtenu en torturant... n'importe quels hommes mais ces hommes la (donc colere et plaisir d'assouvir sa vengeance).
Et pour le passage "L’idée même de ne plus ressentir ce plaisir pervers lui était devenue insupportable. Elle s’était pendue parce qu’elle avait connu des sensations qui lui seraient à jamais interdites "

"sensations (...) interdites" peut etre interprété de deux manieres: interdiction par les textes sacrés, commandements, mais également interdiction de fait car il n'y a plus de coupables sur qui se venger. J'ai choisi cette deuxieme interprétation possible. Apres tout, le suicide est également interdit par les textes, et elle pourrait tres bien torturer d'autres personnes mais elle n'aura plus l'occasion de ressentir cette jouissance... en s'occupant des hommes l'ayant maltraitée.

Le plaisir ici est donc lié a la colere, comme le gourmand prend du plaisir a manger. pas de luxure

Enfin tout ça, c'est histoire de parler, et montre que ce texte m'a accroché

[bréchuedent]

Je ne pensais pas susciter autant de commentaires philosophiques, et je le dis sans rire.

Dans mon esprit, Soeur Valentine prends vraiment son pied en se vengeant et c'est ça qui la fait basculer, peut-être ne l'ai-je pas suffisament montré dans le texte, mais je ne voulais pas non plus tomber le sordide, voire le le voyeurisme., Il y aura peut-être une correction du texte dans ce sens.

Quant à savoir, si son pêché relève plus de la colère que de la luxure....rendez-vous au jugement dernier ! 

Pour le reste l'essentiel est que ces nouvelles vous plaisent, j'en suis très heureux et il y en aura d'autres !

[CCCP]

C'est vraiment pas mal et le passage de la vengeance est bien glauque. La chute est aussi réussie.